7 salariés sur 10 en recherche active d’emploi au Maroc

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Au Maroc comme dans le reste du monde, on assiste à une forte tension sur le marché de l’emploi qui conduit à une mutation profonde des rapports entre salariés et entreprises. Cela questionne fondamentalement les propositions de valeur employeur, les processus de recrutement et de gestion des talents, le modèle managérial et la culture même des entreprises.  C’est l’objet de la nouvelle étude publiée par BCG et ReKrute.com intitulée “What Job Seekers Wish Employers Knew”, basée sur une enquête menée auprès de 90 000 talents dans 160 pays dont près de 400 au Maroc via The-Network, le réseau international de portails emploi leaders dans le monde.

Cette étude se veut révélatrice de l’écart significatif entre les attentes des talents et l’offre RH des entreprises à l’échelle mondiale. Dans le cas du Maroc, les chiffres sont éloquents :

  • Les candidats sont plus « volatiles » que dans le reste du monde avec seul 1% des cadres marocains qui se disent fidèles à leur employeur (vs. 4% au niveau mondial) et 7 cadres marocains sur 10 recherchent activement un nouvel emploi vs. 40% dans le monde.
  • 4 cadres sur 10 refuseraient une offre intéressante car ils ont eu une expérience négative lors du processus de recrutement (vs. 52% à l’échelle mondiale).
  • Comme partout dans le monde, le salaire est devenu le 1er facteur de motivation au travail. Au Maroc il arrive à égalité avec les opportunités d’évolution de carrière (57%).
  • De plus en plus, les actifs au Maroc veulent travailler pour vivre, et non vivre pour travailler : 66% rêvent d’une carrière stable avec un bon équilibre travail-vie personnelle. Un taux qui est bien harmonieux avec la tendance mondiale (69%).
  • Enfin, au Maroc, et plus que dans le reste du monde, le travail en présentiel est plébiscité à 49% vs. 35% dans le reste du monde, à quasi égalité avec le mode hybride (46%).

“ Les résultats de cette enquête mondiale que nous avions mené pour la dernière fois en 2018 sont, cette année, particulièrement intéressants. On y note de nouvelles spécificités comme le fait que c’est la 1ere année que les attentes des candidats marocains sont quasi similaires à celles du monde alors que nous avions d’habitude d’avoir quelques années de décalage. L’effet COVID a donc été unanime partout : recherche de bonheur et de sens sont les maître mots des candidats. Mais aussi intérêt fort pour le salaire comme facteur de motivation au travail, ce que nous n’avions jamais vu en 17 ans d’existence ! C’est désormais aux employeurs d’être challengés : dans leurs méthodes de recrutement comme dans leur capacité à prendre en compte les attentes de leurs potentiels futurs collaborateurs pour attirer et fidéliser leurs équipes.” déclare Philippe Montant, Directeur Général de ReKrute.

Les talents marocains parmi les plus sollicités au monde

Les cadres marocains savent que le marché d’emploi est tendu aujourd’hui et cela change leur rapport par rapport à leur employeur. 65% jugent leur pouvoir de négociation avec les recruteurs de fort à très fort. Cela est essentiellement dû aux multiples sollicitations qu’ils reçoivent de la part de recruteurs : plus de 80% des candidats sont approchés plusieurs fois par an (vs. 74% au niveau mondial), dont 41% sont approchés tous les mois/ toutes les semaines (vs. 39% au niveau mondial).

Seuls 8% des marocains fidèles à leur employeur actuel

 70% des talents marocains cherchent activement un emploi et 2% supplémentaires ont déjà fait le choix de partir ce qui est quasiment deux fois plus que la moyenne mondiale qui s’établit à 40%. Pourquoi cela ? Les salariés interrogés nous disent que c’est d’abord pour chercher un poste plus intéressant ou avec un niveau de séniorité plus élevé (52%) ou  pour explorer un nouveau métier (29%). Une tendance à prendre très au sérieux par les entreprises qui doivent porter une attention plus forte à la fidélisation de leurs collaborateurs.

19% des salariés, ne cherchent pas un nouvel emploi, mais restent à l’écoute du marché. Les recruteurs peuvent les attirer par de meilleures opportunités d’évolution de carrière (57%), un salaire plus élevé (57%) et un meilleur équilibre travail / vie personnelle (31%). Ce qui les séduirait davantage : de meilleures opportunités d’apprentissage (28%), de la flexibilité 19% et une culture d’entreprise en adéquation avec leurs valeurs (19%).

Seulement 8% des collaborateurs envisagent de rester chez leur employeur, 7% pour y prendre de nouvelles responsabilités, d’où l’importance de la gestion de carrière si on ne veut pas les perdre, ils ne sont que 1% à se dire réellement fidèles.

Le présentiel, le salaire et l’équilibre travail / vie personnelle, une quête des talents marocains

La carrière idéale : stabilité et équilibre travail / vie personnelle

Les aspirations des salariés marocains ont changé après la pandémie et l’arrivée de la génération Z sur le marché de l’emploi. Pour eux, c’est l’équilibre travail-vie personnelle avec la possibilité de s’épanouir personnellement qu’ils recherchent avant tout avec 66% des interrogés qui envisagent ainsi leur carrière idéale (1er critère de choix).

Une « carrière idéale » se définit au Maroc – bien plus que dans le reste du monde – par le statut : celui de manager et dans une entreprise de renommée (mentionné par 52% des talents marocains interrogés vs. 26% dans le monde).

 Le salaire, premier facteur décisif pour considérer une offre d’emploi

Les priorités des salariés marocains sont tout à fait en ligne avec ce que nous disent les talents dans d’autres pays du monde, témoignage d’un marché de l’emploi globalisé et d’attentes devenues universelles post COVID.

Nous notons une attente accrue sur le salaire, davantage que les années précédentes, à la faveur du contexte macro-économique inflationniste mais aussi comme suite d’années COVID ayant eu pour conséquence la coupure du lien entre l’entreprise et ses collaborateurs avec le télétravail à 100% (ex. en facteur de motivation, le salaire est passé de 10e en 2018 à 2e en 2022).

La sécurité de l’emploi passe en 2nd position comme facteur de décision pour un nouveau poste pour les Marocains (16%), juste avant l’équilibre travail-vie personnelle (14%). Ce dernier facteur est plutôt classé en deuxième position mondialement.

Ambitieux, les salariés marocains vérifient les opportunités d’apprentissage et l’évolution de carrière (4ᵉ position), avant de s’intéresser à une offre. Ils apprécient la reconnaissance de la même manière que les actifs du reste du monde et la placent 5ᵉ parmi les facteurs décisifs pour considérer une offre d’emploi.

Le télétravail, oui, mais le présentiel préféré par les Marocains

Les Marocains favorisent l’environnement de travail en présentiel qui est aujourd’hui, et plus que dans le reste du monde, leur mode de travail préféré (49% vs. 35% au global) bien loin devant le « 100% télétravail » qui est peu plébiscité (5% vs. 11% au global).

Les logements marocains, ou les transports moins compliqués qu’en Europe, peuvent expliquer ce score. Le fait d’avoir un bureau au domicile n’est pas dans la culture marocaine et tout le monde n’a pas forcément l’espace pour s’isoler du bruit et des enfants chez lui.

Le travail reste aussi une source importante de bonheur au travail. Une enquête ReKrute d’octobre 2022 indiquaient ainsi que seuls 18% des marocains sont aujourd’hui heureux au travail vs. Plus de 50% en 2018. Le COVID et le télétravail ont détruit la relation entre le collaborateur et l’entreprise en supprimant finalement tous les aspects agréables du travail comme les relations avec les collègues, ou même ce qui donnait du sens et donc de l’attachement comme la culture d’entreprise. Et dans un pays où l’on connait l’importance de la relation humaine, on comprend pourquoi les gens préfèrent aller au travail.

 « Le rapport entre salarié et employeur est en train de changer, au Maroc comme ailleurs dans le monde. La priorité des entreprises doit être de re-recruter ses collaborateurs, d’autant plus que le distanciel encore pratiqué dans certaines entreprises a durablement pu affecter l’engagement des collaborateurs. Il s’agit donc de renouer le lien de proximité avec le manager et d’affiliation avec l’entreprise. Cette tension sur le marché du travail est structurelle et les entreprises doivent s’organiser pour tirer profit des opportunités qu’elle représente. D’abord s’assurer de fidéliser ses hauts potentiels, avoir un processus de recrutement et d’intégration ‘industrialisé et performant’, et enfin s’équiper pour dénicher les meilleurs profils disponibles sur le marché », conclut Zineb Sqalli, Directrice Associée au Boston Consulting Group.

Au Maroc, 44% des candidats prêts à refuser une offre en raison d’une expérience de recrutement négative

 Mais tout d’abord, que doit faire l’entreprise pour attirer ses futurs talents ? Pour recruter, les entreprises doivent miser sur des offres transparentes, du contact et de la communication avec les candidats :

  • Une nouvelle opportunité pourrait attirer l’attention d’un candidat alors qu’il n’est pas à la recherche d’un emploi si le recruteur recourt à une approche personnalisée et privilégie le contact direct (cité par 52% des répondants), diversifie et soigne sa présence sur les plateformes d’emploi (cités par 44% des interviewés), et dispose d’un capital image positif pour qu’il soit recommandé par les proches du candidat (39%).
  • Proposer un espace pour envoyer directement au recruteur son CV, ou assurer sa présence en annonces sur les portails emploi, plus que sur les réseaux sociaux d’ailleurs, est essentiel pour permettre aux candidats de toucher les entreprises. Ils sont ainsi 79% et 73% pour les deux premiers critères contrairement à seulement 57% des candidats qui postulent via les réseaux sociaux.

L’expérience candidat, tout comme l’attractivité des talents, reste essentielle pour recruter :

  • 44% des candidats marocains (vs. 70% en France et 52% au niveau mondial) seraient prêts à refuser une offre d’emploi de qualité en raison d’une expérience de recrutement négative (questions discriminantes, mauvais contact avec les recruteurs…). De quoi faire changer les habitudes des recruteurs.
  • La transparence est également essentielle et peut faire la différence lors du processus de recrutement. La possibilité de visibilité les lieux et donc son prochain bureau ferait basculer le choix du candidat à 61%, et le fait de pouvoir échanger avec son futur manager à 51%.

Tous ces résultats soulignent l’importance pour les entreprises de mieux prendre en compte les attentes des candidats et d’adapter leurs processus de recrutement et la gestion des carrières dans un environnement ou la fidélité n’est plus de mise, et le marché de l’emploi en plein boom.